Auteur: Max Brooks
Maison d'édition française:
Calmann-Lévy
Date de publication: 2006 aux USA, 2009
en France
Nombre de pages: 430
Un journaliste est engagé par l'ONU
pour recueillir les témoignages de survivants d'un conflit mondial
dû à une épidémie. Cette dernière ''réanime'' les morts et en
fait créatures pourrissantes et assoiffées de sang...
Max Brooks est, comme son nom
l'indique, le fils de Mel Brooks (La Folle Histoire de l'Espace,
Frankenstein Jr...). Né en 1972, il est surtout connu pour avoir
participé à l'écriture du célèbre late show Saturday Night Live
ainsi que pour avoir doublé des personnages dans des séries
d'animation (Batman, Justice League). Mais en 2005, les choses
changent. Il publie un premier livre en lien avec les zombies, le
bien nommé Guide de survie en territoire Zombie. L'année suivante
le voit continuer dans la même veine avec l'ouvrage qui nous
intéresse: World War Z, qui sera adapté au cinéma en 2013.
Alors, qu'est ce qui différencie World
War Z du reste de la production littéraire et culturelle tournant
autour de nos amis les morts-vivants? Tout d'abord, sa narration. Le
fait de fonctionner comme un recueil d'interview se déroulant après
les faits est assez nouveau. Le procédé épistolaire ayant connu
son âge d'or au XIXème, il est intéressant de le voir associé à un contexte assez moderne. On suit donc le journaliste à
travers le monde, à la rencontre de personnages divers et variés.
Responsables politiques, militaires, scientifiques, gens du
commun...toute sorte de personnages évoluent dans ces pages. Bien
que la majorité soient américains, on voit quand même du pays
(Inde, Corée, Canada, France...). Tous ont en commun d'avoir
participé au plus grand conflit de l'Histoire humaine, la guerre des
zombies. Il n'y a donc pas de héros mais un fil rouge (le
journaliste, sur lequel on ne sait pas grand chose) et des
personnages lui contant leur histoire. Le fait d'avoir affaire à des
témoignages rend l'intrigue extrêmement concrète, les points de
vue multiple permettant de donner une sensation de densité
étonnante.
On a clairement affaire à une œuvre
qui fourmille de détails et dont le statut oral (inspiré par La
Bonne Guerre de Studs Terkel, ouvrage culte Outre-Atlantique) permet
d'instaurer un réalisme ahurissant. Brooks a pensé basiquement à a
peu près tout. Les détails sont légion, il y a même un petit
vocabulaire lié au conflit qui le rend diablement vivant. L'auteur
arrive à parfaitement gérer les échelles qui vont de l'individuel
au plus épique en étant toujours centré sur l'humain. L'humain qui
est, plus encore que les zombies, le cœur du propos. On y voit le
pire et meilleur, le plus net et le plus ambigu au sujet des
personnages. On parle quand même d'une guerre mondiale avec des
zombies, personne ne l'avait jamais fait ça (même Romero, bien que
crédité comme source d'inspiration, évidemment) !! On a même un
aspect post-apocalyptique puisque le le narrateur évolue dans un
monde qui a surmonté la crise, en en sortant complètement changé
(la Chine est devenue une démocratie, Cuba est la première
puissance mondiale...). Tout sonne vrai, chaque mot, chaque
situation, des premiers symptômes de l'épidémie jusqu'à la
reconquête progressive du monde en passant par les mouvements de
panique. Tout semble être fait pour qu'on y croit, qu'on s'immerge
dans le récit sans aucune retenue, tantôt terrifié, tantôt amusé
ou révolté...Il y a tant à dire sur chaque chapitre, on pourrait
réaliser un film par segment de ce livre!!
Une vue d'artiste d'une bataille décrite dans le livre |
En parlant de film...vous aurez
sûrement remarqué que je n'ai pas parlé de l'adaptation
cinématographique. Plusieurs raisons à ça (c'est un blog sur la
littérature, pas le cinéma, pas de temps avec ces conneries...)
mais sachez simplement que Brooks a totalement renié le métrage
considérant que celui-ci n'avait de commun avec son livre que le
titre... Allez, comme je suis de bonne humeur et qu'une image est mieux
qu'un long discours:
Le livre a clairement un aspect
viscéral et anxiogène très fort qui peut s'expliquer par le
contexte dans lequel il a été écrit, très difficile d'après
l'auteur (maladie, problèmes familiaux). On le sent clairement et
certains passages sont assez durs, pas seulement en termes de gore
mais aussi à un niveau plus intime. En effet, les instantanés qu'il
nous livre sont assez forts et nous touchent parfois de manière
inattendue. A ne pas mettre entre toutes les mains, donc. Mais tout
cela est au service d'un sous-propos intéressant, critique des
gouvernements et de notre société actuelle, de l'absurdité du
monde que nous avons fait nôtre...Et ça fait mouche à de
nombreuses reprises.
L'autre ouvrage de Brooks sur le même thème, chaudement recommandé |
En conclusion, il s'agit clairement
d'une des œuvres les plus inventives du revival zombie que l'on vit
(huk huk) depuis une grosse dizaine d'années. Elle mérite
clairement son statut culte de par son intelligence et sa capacité à
transcender les codes d'un genre très balisé. Un petit
chef-d'oeuvre apocalyptique et humain.
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